La sorcellerie

Les alchimistes ne sont pas les seuls à avoir souffert d’une réputation malmenée à tort et à raison. Les femmes préparant des remèdes à base de plantes, pour soigner les autres, furent assimilées pendant des siècles à des sorcières aux pratiques hérétiques et animistes.

Cependant, et avant qu’elles ne soient systématiquement persécutées à cause de leur statut de femme, de leur contestation de « l’ordre » établi, ou encore de leur très forte influence, les sorcières (et sorciers, comme Merlin dans la légende du roi Arthur) se distinguaient par leur connaissance extraordinaire de la nature, leur pouvoir de guérison, et leur langage étrange rappelant celui des alchimistes. On parle encore de « guérisseur » en Europe, mais plus jamais de « sorcière ». Leur équivalent aujourd’hui serait les chamans d’Amérique (nous en parlerons dans dernier module).

Du début du Moyen-Age jusqu’aux derniers procès de l’Inquisition au XVIII ème siècle, elles sont les « médecins du peuples » selon Jules Michelet, qui les réhabilite dans son fameux livre La Sorcière (1862), revenant sur tous les procès au cours des siècles passés. L’historien raconte ainsi qu’elles n’avaient souvent rien de l’apparence terrifiante qu’on leur a prêté (comme dans Macbeth de Shakespeare ou toutes les représentations dans les comptes) : « Beaucoup périrent précisément parce qu’elles étaient jeunes et belles ».

La plupart entretenaient plutôt une foi ingénue en Dieu, qu’elle ne différenciait pas des forces de la nature. Certaines se trouvaient même dans les couvents avant d’être accusées de sorcellerie (leur beauté ou leur compréhension du monde étant parfois considérées comme des tentations).

Parmi les milles remèdes, des sorcières figurent bien évidemment les potions et les huiles essentielles obtenues à partir des alambics. Jusqu’à très récemment (et avant la législation en France sur la contraception en 1975, par exemple), c’est la sorcière (ou la guérisseuse) qui recevait les femmes souhaitant avorter. On leur recommandait des infusions ou l’usage des huiles essentielles efficaces en pareille situation, comme Salvia officinalis – Sauge officinale ou Mentha pulegium – Menthe pouliot.

Ces deux huiles provoquaient la mort du fœtus, mais aussi parfois de la mère. Pour ces raisons, leur vente libre a peu à peu été interdite en France. La mauvaise réputation des sorcières perdure ainsi depuis des siècles, jusqu’à justifier au XX ème siècle une décision unique à la France : en 1941, un décret du maréchal Pétain interdit la profession d’herboriste, ainsi que la vente de plantes médicinales (réservées aux pharmaciens). Vous comprenez ainsi pourquoi le pouvoir des plantes est qualifié de science obscure…

Un bon usage de l’aromathérapie continuera à réhabiliter ces pratiques historiques et naturelles. Elles semblent d’ailleurs, dans l’air du temps, comme le montre le succès impressionnant des aventures de Harry Potter, louant justement les pouvoirs des sorciers et des sorcières cherchant, comme les alchimistes, à retrouver la lumière.

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